Depuis quelques années, les éditeurs de logiciels multiplient les “audits de licence”.
Ces audits sont déclenchés en application de clauses contractuelles et, il faut bien le dire, évitent tant à l’éditeur qu’à son client d’en passer par la voie de la saisie-contrefaçon. Celle-ci, toujours possible (surtout en cas de refus du client d’appliquer la clause d’audit), est coûteuse et fastidieuse pour l’éditeur qui doit saisir la justice et, surtout, elle présente l’inconvénient majeur de mettre véritablement à risque la relation qu’il entretient avec son client.
Alors qu’avec un audit et une bonne dose de marketing… l’éditeur vient – forcément – assister son client dans la gestion de ses “assets” que constituent les droits d’utilisation de logiciels dont celui-ci dispose (SAM = Software Asset Management). Plusieurs facteurs peuvent conduire un éditeur à auditer l’un de ses clients : contrôle statistique, différences constatées entre le nombre de licences souscrites et la maintenance commandée, opérations de croissance externe répétées, volonté de faire passer le client à un nouveau logiciel ou vers un nouveau mode de facturation… mais aussi dénonciation d’un (ex-)salarié mécontent par exemple.
De leur côté, les clients ne sont pas toujours exempts de tout reproche : absence complète de gestion de leurs actifs logiciels, absence d’utilisation d’un outil de gestion de licences, déploiement systématique de logiciels sur tous les postes, voire volonté délibérée de ne pas payer de licence à l’éditeur.
D’ailleurs, de telles situations conduisent souvent les entreprises à payer des licences voire des prestations de maintenance et support pour des logiciels qu’elles n’utilisent plus ou pas dans les proportions de ce qu’elles paient. Pour complexifier s’il en était besoin les choses, les contrats soumis par les éditeurs présentent très souvent des concepts juridiques pas ou mal adaptés de leur origine anglo-saxonne, des clauses obscures, des définitions en cascade rendant quasiment incompréhensible la lecture juridique de leurs contrats ou encore des modèles de licensing parfois contre-intuitifs.
Bien entendu, l’absence de conformité au contrat ouvre droit, pour l’éditeur, d’une part, à l’application du prix qui aurait dû lui être payé pour les licences mais, également, à l’application du prix qui aurait dû lui être payé pour la maintenance et le support. Et, même si une négociation s’engage, il faut rappeler que cette absence de conformité s’analyse comme la commission de faits de contrefaçon (article L335-3 du Code de la propriété intellectuelle), lesquels sont pénalement réprimés par trois ans d’emprisonnement et de 300.000 euros d’amende (outre des dommages et intérêts).
Etant noté, d’une part, qu’en application de l’article L335-9 du Code de la propriété intellectuelle, si l’auteur d’un délit de contrefaçon est ou a été lié par convention avec la partie lésée, les peines encourues sont portées au double et, d’autre part, qu’en application de l’article 131-38 du Code pénal, le taux maximum de l’amende applicable aux personnes morales est égal au quintuple de celui prévu pour les personnes physiques. Les peines complémentaires de l’article 131-39 du même code étant par ailleurs également applicables.
Il en résulte une contrainte assez forte sur le client pour accepter le principe d’une discussion avec l’éditeur, mais pas nécessairement les montants proposés par ce dernier…